Le vieux qui lisait des romans d’amour

« Le Vieux qui lisait des romans d’amour » est le genre de livre qu’on a envie de relire. Dix ans après ma première lecture de ce court roman, je l’ai réouvert. Et, sans surprise, je l’ai dévoré.

Comme le titre l’indique si bien, c’est l’histoire d’un vieil homme qui aime lire des romans d’amour, des romans tristes mais qui finissent bien, des romans qui le font voyager à Paris, Londres, Venise, … lui qui n’est jamais parti bien loin.
Antonio José Bolivar aura vécu dans deux endroits différents, ni plus, ni moins. Le premier est le village dans lequel il a grandi et se maria. Son second et dernier lieu de vie se situe aux abords de la forêt amazonienne, à El Idilio. Là-bas l’attendait la promesse d’une vie meilleure mais les terres se sont avérées infertiles et la malaria a sévi de nombreuses fois, emmenant avec elle sa femme. Dorénavant seul, Antonia José Bolivar apprend à se débrouiller et à apprivoiser cette terre d’adoption qui ne lui a apporté que du malheur. Il fera la rencontre des Shuars, un peuple d’autochtones vivant dans la forêt, qui lui apprit à chasser ou encore à guérir de certaines blessures. Très vite, le vieux apprendra leur langue et deviendra leur ambassadeur auprès des Blancs. Il faut dire qu’aux yeux de ces derniers, il ne s’agit que de sauvages, des voleurs et même des tueurs.
C’est donc sans surprise que lorsque deux Shuars amènent le corps sans vie d’un homme blond au village d’El Idilio, le maire les accuse de meurtre. Mais c’est sans compter Antonio José Bolivar qui fera remarquer que les lacérations présentes sur le cadavre n’ont rien d’humain. Il s’agit des griffes d’une panthère ! Un coup d’œil dans la sacoche du chasseur dévoile les faits. A l’intérieur se trouvent des peaux de petits félins. Inutilisables par leur taille, elles auront au moins provoqué la colère de leur mère qui risque de s’y reprendre à nouveau…

Alors qu’à la lecture de ce livre, j’étais recroquevillée dans le canapé, cachée sous un plaid pour affronter le froid d’hiver qui s’immisce doucement dans les maisons, Luis Sepúlveda a réussi en un rien de temps à me téléporter à l’autre bout du monde, dans un climat chaud et humide, tout sauf confortable… On plonge dans une nature grandiose, une forêt amazonienne immense où cohabitent les animaux et les Shuars. J’ai d’ailleurs été fascinée de découvrir leurs modes de vie et la symbiose qu’il existe entre eux.
Ce roman tire aussi le portrait de colons malintentionnés, des hommes qui veulent posséder mais qui ne respectent rien de ce qui les entoure au risque de blesser des animaux inoffensifs ou d’abîmer une nature jusque-là immaculée. Poussés par les idéaux des gouvernements, ils ne viennent avec en tête une seule raison : l’argent.
On fait donc face à deux extrêmes, entre la vie simple des autochtones vivant en harmonie avec les autres habitants de la forêt et la recherche de la gloire des chasseurs d’or et d’animaux.
Entre ces deux mondes diamétralement opposés se trouve Antonio José Bolivar. Lui qui préférerait fuir la stupidité de ses contemporains en se plongeant dans un bon roman d’amour, il se retrouve face à un dilemme : protéger les siens ou sauver la forêt amazonienne, son foyer d’adoption.

En plus d’attaquer les gouvernements contre leur politique du toujours plus, Luis Sepúlveda pose également les bases de l’écologie avec, en fond sonore, une sonnette d’alarme pour ce qui se passe en Amazonie. Nous sommes en 1992. Et là encore, je me dis à moi-même « Mais pourquoi On est toujours aussi lent à réagir ?? ».

N’hésitez plus à vous procurer ce bouquin si ce n’est pas déjà fait. Aussi petit soit-il, il regorge d’idées et amène à de nombreuses réflexions qui sont toujours d’actualité. Je suis d’ailleurs très contente de l’avoir redécouvert. Lu pour la première fois alors que je n’avais que 14 ans, je me rends compte qu’il est beaucoup plus complexe que ce dont je me souvenais, et que j’étais passée au-dessus de pas mal de choses au final… Une lecture bénéfique donc, qui m’a permis de recroiser le chemin d’Antonio José Bolivar, et rien que ça, ça en vaut la peine.

« Ce fut la découverte la plus importante de sa vie. Il savait lire. Il possédait l’antidote contre le redoutable venin de la vieillesse. Il savait lire. Mais il n’avait rien à lire. » (pp. 55-56)

 

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Le vieux qui lisait des romans d’amour
Luis Sepúlveda (1949-)
Points 2003 – 121 pages
Première publication originale et en français en 1992 (Editions Métailié)
Titre original : Un viejo que leía novelas de amor
Traduit de l’espagnol (Chili) par François Maspero
ISBN 13 : 9782020239301
ISBN 10 : 2.02.023930.2

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